Les sacs posés dans notre chambre, le pique-nique rapidement empaqueté, nous nous mîmes en chemin à la découvert de ce parc carte-postale. Entre mer et collines boisées de forêt primaire, Abel Tasman allait nous stupéfier par ses eaux turquoises et ses plages de sable doré. Si nous ne mouillâmes que nos pieds dans l'eau fraîche des criques, nous profitâmes avec ravissement de la solitude du touriste hivernal.
Les sentiers du parc commencent juste à la sortie de notre auberge.
Il suit tout d'abord un palud, où s'égaient tussocks, galets et oiseaux divers. Les randonneurs, nombreux l'été s'en sont donné à coeur-joie et des noms de tous pays écrits avec des roches parsèment le marais.
Nous rattrapons cependant bien vite les frondaisons et commençons notre marche dans un paysage de forêt tropical qui nous est devenu classique sans être banal.
Pendant la première partie la mer est encore juste à côté de nous avant de gravir les collines.
Le parc se dévoile alors de haut nous offrant de beaux points de vue sur les îles environnantes, la pointe nord des Alpes et la baie.
En progressant, défilent devant nos yeux les paysages turquoises et dorés qui ont fait la réputation de ce parc. De plus comme à chaque parc visité en Nouvelle-Zélande, les chemins de terre, les passerelles, ponts et autres escaliers creusés dans al roche sont remarquablement entretenus. Tout est propre, aucun papier ou sac plastique. Les promeneurs suivent avec une rare discipline la consigne de ne rien laisser d'autres que les empreintes de leurs chaussures.
Nous sommes de temps en temps doublés par quelques personnes, jamais plus de 3 à la fois, au début. Après une heure de marche nous retrouvons cependant seuls, dans un décor qui, sous un chaud soleil d'hiver, n'a rien à envier au paradis. C'est le bon moment pour déjeuner sur la plage.
En reprenant le chemin du retour, nous trouvons, le long d'un campement aménagé, un banc gravé par un francophone. L'endroit est en effet d'un romantisme échevelé et il n'est pas difficile pour les yeux de se perdre langoureusement dans la mer d'un bleue irréel. Je ne suis cependant pas sûr que j'aurais gravé ce genre de message sur un endroit destiné à recevoir le postérieur de milliers de gens chaque année. Mais je manque peut-être de sensibilité...
Fourbus, nous marchons vers le "backpacker" et la moelleuse promesse du lit, quand soudain, après de nombreuses années de bon et loyaux services, à travers l'hiver montréalais, comme l'été corse, les souliers d'Émilie décident de la lâcher. L'un après l'autre ils voient leurs semelles se décoller en un sourire pénible. Émilie trébuche, s'emmêle, mais avance vaillamment, jusqu'à ce que les semelles partent finalement de leur côté faire leur vie... dans une poubelle!
"The Barn" nous attend au bout de la route. Vieille grange qui servait au séchage du tabac, elle a été reconvertie en auberge de jeunesse au confort "rustique". L'eau est tiré du puits, les douches comme l'électricité est minuté. Nous sommes chauffés par un bon gros poêle dans le salon/salle à manger. Là, il ferait bon somnoler tranquillement avec un bouquin si un van entier de jeunes touristes bruyants n'avaient débarqués pour la nuit.
Il suivent une des nombreuses compagnies qui proposent des tours organisés jeunes et branchés du pays. C'est comme une colonie de vacances pour jeunes adultes en somme. Anxieux de faire connaissance et bonne impression tout à la fois, chacun s'émerveille frénétiquement devant chaque casserole de nouilles au beurre préparée par un autre.
L'uniforme réglementaire du "backpacker" en Nouvelle-Zélande est scrupuleusement respecté : morceau de jade vaguement maori autour du cou (en blanc ou en vert), T-Shirt commémorant un saut en parachute, ou à l'élastique quelconque, pantalon à poches pour les garçons, et de sport "A&F" pour les filles. Les classiques néo-hippies de + 30 ans sont aussi là, taxant des cigarettes ou des bières et proposant avec un grand sourire fraternel des échanges de bouffe pas toujours à votre avantage.
Dans cette auberge comme dans les suivantes le même schéma se répète, les occidentaux (Allemands, Britanniques et Français étant les plus nombreux), ou des européens de l'est, sympathisent entre eux, avec le plus d'alcool et de bruit possible, quand les asiatiques, plus discrets se mettent (ou sont mis?) à l'écart. Il n'y a bien sûr jamais personne venant d'Afrique ou de pays arabes. Quelques rares sud-américains de temps en temps. Étonnamment (ou pas finalement) peu, voir pas du tout de maoris ou de polynésiens.
Il n'est pas évident de savoir ce qui trace les barrières aussi facilement et ce qui les efface dans des groupes relativement jeunes, éduqués et ayant suffisamment d'argent pour voyager. La barrière de la langue n'est pas toujours l'explication, la Nouvelle-Zélande compte en effet une importante communauté asiatique depuis quasiment la fondation du pays et de nombreux jeunes de toute l'Asie et le Pacifique viennent y faire leurs études. De plus si les Français arrivent à baragouiner quelque chose, n'importe quelle autre personne est capable de joutes oratoires de haute-volée...
Alors quoi? qu'est-ce qui amène cette ségrégation spontanée et si bien respectée? à vous de me le dire si vous avez des idées...
Heureusement nous n'allions plus que croiser ces grossiers merles de loin en loin au cours du voyage, jusqu'à notre dernier changement d'itinéraire qui nous désynchronisera pour le coup du peu de voyageurs sur la route avec nous. Mais c'est une autre histoire
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